Asie
JAPON - de Shimonoseki à Takamatsu
En ce mois d'août, c'est avec une pointe d'émotion que je me retrouve en gare d'Osaka, le Shinkansen prêt à filer plein ouest sur la ligne Sanyō. Déchargé de mes bagages, confiés au service de livraison express appelé takkyubin, je serai bientôt de retour sur les rivages de la mer intérieure de Seto (voir Horizons Monde n°28). J'ai le souhait de me concentrer sur les villes hypermodernes, souvent très peuplées, mais toujours accueillantes, et qui savent préserver un beau patrimoine historique et culturel.
Shimonoseki, l'esprit samouraï
À deux heures et demie d'un confortable trajet, ma première étape est la plus grande ville de la préfecture de Yamaguchi, forte de 292 000 habitants. Shimonoseki est située à la pointe occidentale de l'île de Honshū, face à celle de Kyushu au-delà du détroit de Kanmon, entre mers du Japon et de Seto. Je me promène bientôt dans la ville fortifiée de Chofu, beau témoignage d'une histoire millénaire. Elle a conservé ses enceintes de pierre et ses maisons, mais pas son château démantelé sur ordre du Shogun pendant la période d'Edo. L'esprit samouraï n'était pas toujours propice à la stabilité politique... En fin d'après-midi, je fais l'aller-retour à Kyushu par le tunnel Kanmon, long de 780 mètres, rare exemple de voie piétonne sous un détroit. Arrive enfin l'heure de savourer une spécialité locale considérée comme très raffinée : le sashimi de fugu ! La bête est aussi appelée « poisson-globe », car elle se gonfle d'eau à la perception d'une menace. Ses intestins, gonades, peau et foie contiennent un poison très toxique, sans antidote connu. Pour ne pas trop risquer la mort dans les quatre à six heures, il ne faut consommer que la chair préparée par un chef agréé. Les tranches fines sont un peu fades à mon goût, mais le frisson est bien là... Le lendemain matin, guilleret, je me rends sur l'île de Ganryujima où deux des meilleurs samouraïs du XVIIe siècle se battirent pour montrer leur prééminence ; le vainqueur renonça ensuite aux duels et nous laissa un traité sur l'art de manier le sabre. J'apprends plus tard, au sanctuaire d'Akama, que la guerre opposant les clans Genji et Heike - la guerre de Genpei - se conclut près de Shimonoseki en 1185, par la victoire de l'armée samouraï sur celle restée fidèle à l'Empereur. Âgé de huit ans, celui-ci se jeta alors avec sa suite et ses hommes dans un tourbillon du détroit. Le sanctuaire shinto lui rend un hommage émouvant. Fondé en 1327, aujourd'hui partiellement classé trésor national, le temple bouddhiste Kōzan-ji me plonge dans un Japon médiéval plus apaisé. Dans la soirée, je me joins à plus d'un million de personnes patientant le long du détroit. Les 13 000 feux d'artifice du festival annuel embrasent la nuit.
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